Comment une telle chose était possible ? Je n’avais pas pu me tromper. Josephine Dorothy Violet Hightower avait commis une erreur. Certes, certain diront qu’il s’agissait là d’une inattention, rien de grave. Mais c’était bien plus que ça dans mon esprit. J’avais passé la nuit à me tourner et me retourner dans mon lit en pensant à cette fichue attestation que j’avais oublié de fournir dans mon dossier. Et ce n’était que maintenant qu’ils me le disait ? Comment avais-je pu passer toutes ces nuits sans me douter de cette terrible erreur de ma part. Cette première année universitaire commençait définitivement bien. Peut-être qu’il fallait voir là un rappel. Peut-être que, finalement, ce n’était pas une si mauvais chose.

Je m’explique : hier soir, en avant d’aller me coucher, je vérifie ma boîte mail universitaire et remarque un message de l’administration qui date de trois jours déjà. Il est écrit qu’il manque une attestation à mon dossier, qui aurait dû être fournie lors de mon inscription. Il m’est donc demandé de ramener ce papier le plus vite possible au secrétariat des inscriptions. Perplexe, je vérifie le classeur où j’avais rangé l’entièreté de mon dossier. Or cette fameuse attestation y figure bien. J’avais fait ce dossier moi-même refusant l’aide de mes parents. Et là était ma punition. Parce que j’avais oublié que cette année, je devais m’ouvrir aux autres, apprendre à demander de l’aide, cette attestation manquante était entièrement de ma faute. Si j’avais demandé à un proche de vérifier mon dossier avant son envoi, cela ne serait pas arrivé.

Cependant, cela sonnait un peu comme une histoire de karma. Et cela ne me plaisait pas trop. Blâmer une chose immatérielle, ce n’était pas très juste. Alors que je savais que la seule dans cette histoire à avoir commis une faute était moi. Faire porter une partie de mon fardeau à une promesse que je m’étais faite, ne se faisait pas. C’était toute ces pensées qui m’avaient empêché de trouver le sommeil. Tournant en boucle dans mon esprit, comme un poltergeist s’amusant à mettre toutes mes pensées sens dessus dessous. Quelle belle façon de commencer cette année qu’avec une nuit blanche. Heureusement, ce cher Mr. Wilde était là pour me soutenir.

Je m’étais réveillée avec mon livre écrasé sur le nez. C’était loin d’être une première. Cela me pris quelques minutes avant que tout ne me revienne à l’esprit et c’est là que nous avions commencé. Quelle petite tête tu as Josie ! Habituellement, j’aimais prendre mon temps pour me préparer et être sûre de ne rien oublier. Mais ce matin, il fallait que je passe au secrétariat au plus vite, donc pas le temps de se prélasser. J’enfilais une jupe plissée, une chemise, un blazer. Je pris le temps de brosser et attacher mes cheveux, brosser mes dents, attraper mon sac et mon attestation avant de sortir.

Ce qui c’est pas dans cette histoire, c’est qu’en plus de mon devoir du jour, je ne m’étais pas réveillée aux aurores. Heureusement, je n’avais pas de cours de prévu aujourd’hui. C’était tout de même une mauvaise habitude que d’oublier de programmer un réveil. Cependant, j’avais assez à me blâmer avec cette histoire d’attestation pour ajouter à ma peine celle du réveil. Arrivée dans le bâtiment administratif, je réalisais que je n’avais pas la moindre fichue idée d’où je devais me rendre. Où était ce fameux secrétariat ? Totalement perdue, au lieu de songer à demander de l’aide, je regardais aux alentours, en avançant au hasard. Mes yeux allèrent même jusqu’à vérifier au plafond.

“Josie, mais qu’est-ce que tu fais, tu n’es vraiment pas réveillée ce matin, soufflai-je à moi-même.”

Je n’aurais pas dû lever les yeux le plafond plus de quelques secondes. Mais quelque chose me dérangeait. Il était étrange ce plafond. Comment est-ce qu’il pouvait y avoir des tâches là haut ? Personne ne pouvait renverser de café ou de thé sur ces surface. A moins d’inverser la gravité. Mais je doutais qu’une telle chose soit possible ailleurs que dans un roman de science-fiction. Ou alors, peut-être qu’il s’agissait de taches de tabac ? Je ne fumais pas, mes parents non plus, donc j’étais loin d’être une experte. Il me semblait tout de même qu’une telle chose était possible. Le problème était le suivant : il est interdit de fumer dans les bâtiments. Qu’est-ce qui avait bien pu arriver à ce pauvr plafond ?

- Hey ! Salut ! Dis-moi, tu chercherais pas le secrétariat qui s'occupe des justificatifs confirmant la validation de la demande pour la...

Je baissais la tête vers le jeune homme en face de moi. C’est à ma personne qu’il s’adressait ? Je jetais un coup d’oeil par dessus mon épaule pour être sûre. Mais non, nous étions seuls dans ce couloir. Puis me désignait son papier pour me montrer de quoi il parlait. Je reconnu le même document que celui que je tenais entre mes doigts. Donc il cherchait le même secrétariat que moi ? Ce jeune homme m’avait l’air fort excité. Il avait dû boire plus de café que ce qui était recommandé. Ou alors il était naturellement hyperactif ? Qui sait. Ou alors c’était moi qui était définitivement trop lente à réagir.

- Ce papier-là ?

Bien qu’il s’agissait du même document que le mien, je le scrutais un instant pour m’assurer de leur similitude avant de commencer à hocher la tête doucement. Sur une petite voix, je lui répondis enfin :

- Oh euh, oui, c’est ça. Le secrétariat des inscriptions.

Je ne savais pas quoi dire de plus, j’étais plantée là comme une imbécile. Et il s’écoula un certain temps, une sorte de silence gênant avant de je n’ose reprendre :

- J’imagine que tu le cherches aussi ? Désolé, je viens d’arriver, je ne sais pas trop par où aller…

Allez Josie, courage, rappelle toi tes résolutions pour cette nouvelle année scolaire. Je réunis tous mon courage pour ajouter un :

- Si tu veux, on peut chercher ensemble ? Enfin, si ça te vas, je ne voudrais pas…

C’était un bon début, il y avait de quoi être fière. Par contre j’avais été incapable de finir ma phrase. Et incapable de regarder mon interlocuteur. Je me forçais à lever les yeux vers lui et à observer ses traits. Sans en avoir conscience, j’affichai un sourire. Il était mignon, j’aimais bien ses cheveux en bataille, ça lui donnait un côté assez, amusant. Je l’imaginais bien dans un roman de Jane Austen ou des soeurs Brontë. Malheureusement, son accent américain risquait de faire tache parmi la noblesse anglaise. Que voulez-vous, personne n’était parfait.

Ces quelques secondes de silences avant sa réponse me semblèrent être une éternité. Et pourtant, je voyais bien dans son regard qu’il avait l’esprit ailleurs. Je connaissais bien cette expression. On dit que les menteurs savent se reconnaître entre eux, peut-être qu’il en était de même avec les rêveurs ? Qui sait. Ou alors, je me trompais totalement à son sujet et il était en train de se demander pourquoi je lui parlais. Ou alors, je n’avais pas parlé assez fort et il ne m’avait pas entendu ? Est-ce que je devais répéter ma proposition ? Oh non, dans ce cas là, ça ne valait pas la peine. Cela m’avait déjà pris un assez gros effort de lui demander de l’aide, même indirectement, alors hors de question que je formule cette demande à voix haute une seconde fois.

- Carrément ! A nous deux, on va bien finir par trouver ! Y a des chances que tu sois plus douée que moi parce que ça fait bien une heure que je tourne, là…

Mon esprit n’avait pas prit en compte cette possibilité. Il acceptait ma proposition et semblait même enthousiaste à cette idée ? Quoique, je sentais un peu de dépit et de lassitude dans sa voix… Sans doute à cause de l’heure qu’il avait passer à tourner dans tous les sens sans parvenir à son but, ce qui n’était en rien lié à ma personne. Au contraire, il venait même d’assumer que je serais plus douée que lui ? J’allais ouvrir la bouche pour répondre, mais il fut plus rapide que moi.

-Franchement, on m’avait dit que tous ces trucs administratifs, c’était une tannée, mais je pensais pas que ça serait aussi… infernal. Ça fait trois fois que je viens en une semaine : d’après eux, il manque toujours quelque chose. Alors…

Je ne pu m’empêcher d’afficher un petit sourire. Que je fis de mon mieux pour réprimer. Non, mais quelles sont ces manières Josie ? Ce pauvre jeune homme allait penser que je me moquais de son mauvais sens de l’organisation. Ce qui n’avait rien de drôle était donné que j’étais là pour la même raison que lui. Quoique, c’était ma première visite cette semaine et c’était même ma première visite au bâtiment administratif tout court en réalité. Mais je savais que ce qui m’amusait dans son discours, c’était son vocabulaire et parce que j’étais bien d’accord avec ce qu’il disait. Toujours silencieux, je le regardais lever les yeux vers une affiche au mur.

- Au fait, t’es dans quelle section ? Parce que visiblement, y a un bureau pour chacune. Moi, je suis en sport, donc, si j’ai bien compris le plan, c’est au 3ème étage... et toi ?

Cette affaire devenait compliqué. Je pensais qu’il suffisait de se rendre dans un secrétariat, pas qu’il fallait en plus résoudre l’énigme du labyrinthe. Et dans tout ça, allez savoir pourquoi, mon cerveau, décida de ne retenir qu’une seule information. Ou tout du moins, pour le moment de ne se préoccuper que de celle-ci.

- En sport ? C’est génial ça ! En quelle spécialité ? Oh non ! Laisse-moi deviner. Attend, tournes-toi en face de moi que je t’observe.

Et voilà comment on arrive à perdre cette très chère Josephine Hightower. Plus sérieusement, j’étais capable de m’emballer pour de toutes petites choses, mais est-ce que c’était bien grave ? De toute façon, sur le moment, je ne réalisais pas que mon comportement puisse perturber mon interlocuteur. J’étais bien trop préoccuper à le regarder de haut en bas. En même temps, je réfléchissais à voix haute :

- Mh, j’ai l’impression que tu sois un peu plus musclé au niveau des bras, mais c’est peut-être simplement une illusion, parce que avec les vêtements c’est plus difficile de savoir. En tout cas, tu es fin, donc un sport où il ne s’agit pas seulement de force brute. J’aurais bien dit quelque chose comme du tennis ou de la natation, mais ça ne colle pas avec les hématomes sur tes avants bras, on dirait que tu t’es protégé avec pour… Je sais !

Souriante, je levais un doigt, pour révéler à l'assistance le dénouement de cette intrigue, et annnonçai fièrement :

- Ta spécialité c’est le Taekwondo !

Il me semblait que cela collait avec toutes les détails réunis. Et je serais assez vexée de me tromper. Ce qui pouvait arriver, je le savais très bien. Surtout que le Taekwondo n’était pas le seul sport où on était susceptible de se protéger avec ses bras. Mais c’était le premier qui m’était venu à l’esprit. Et c’est à cet instant que mon cerveau se reconnecta à la réalité. Mon regard alla de nouveau fixer un point invisible au sol, parce que cela pouvait être gênant d’observer un jeune homme avec autant d’insistance. Et surtout, ce n’était pas convenable, qu’est-ce que dirait maman.

- Oh, je suis désolée, je me suis laissée emportée hum… Le troisième étage, tu disais ? On y va ?

Changement de conversation express, allez Josie avec un peu chance ça allait passé. Et dans l’entrefait, j’avais oublié que je venais d’éluder ses questions sur ma propre section. Et qu’il ne m’avait pas demandé ça pour faire connaissance, simplement pour une question pratique, parce qu’apparemment, selon les filières les secrétariats étaient différents. Pf, super, ce jeune homme était une de mes premières rencontre à l’université et j’avais déjà tout fichu en l’air.

Tu es terrible Josephine, regardes ce pauvre garçon comme tu l’as mis mal à l’aise à le détailler de la sorte. Je me sentais vraiment honteuse. Pour le coup, je n’osais plus le regarder du tout. Donc impossible de savoir quelle était sa réaction. Oh, il était sûrement déstabilisé et mal à l’aise par ma faute. Louison ne savait pas à quel point il y allait y avoir du travail pour faire de moi une personne sociable et sortable. Pourtant, on m’avait appris à bien me tenir en société. Il fallait croire que j’étais simplement incapable de contrôler mon impulsivité et ma curiosité. Après avoir monopoliser autant la parole, je cru que j’allais faire fuir mon interlocuteur. Mais non, surprise, je relevais la tête vers lui en l’entendant dire :

- Alors. Déjà. D'un, c'était bien vu, mais je fais pas de taekwondo : je suis boxeur. Et de deux, on va y aller au troisième étage, mais tu m'as pas dit c'est quoi ta section.

Boxeur ? Je n’étais pas loin en effet, mais je n’y aurais sûrement jamais pensé. Et soudainement, je me souvenais de sa question, alors qu’on se mettait en chemin vers le troisième étage. Cependant, le sportif reprit :

- Je suis pas aussi doué que toi aux devinettes... Et d'ailleurs, tant qu'à faire, moi c'est Sam. Et toi ?

Entre temps, il s’était mis à rire et je l’avais suivie. A la fois parce que son rire était contagieux et parce que j’étais soulagée que la situation l’amuse. Je n’étais pas du genre à me donner en spectacle, mais là, je l’avais fait malgré moi et, vraiment, j’étais contente qu’il ne le prenne pas mal. Reprenant un peu plus confiance en moi, cette fois-ci, je ne m’égarai pas sur autre chose pour répondre :

- Josephine ! Je m’appelle Josephine et je suis en licence de lettres moderne. Donc, pas le même bureau en effet, mais il me semble avoir vu qu’il était au même étage. Je crois qu’ils ont regroupé un maximum les licences à cet étage.

Trouver l’étage était une bonne chose, mais trouver le bon secrétariat serait encore mieux à présent. Mais encore une fois, dans l’immédiat mon cerveau était sur autre chose. Tiens, je ne m’était même pas vexée de mon erreur, pourtant c’était une chose qui m’arrivait souvent, à croire que l’amusement de mon interlocuteur m’avait suffisamment détourné l’attention.

- Et tu pratiques quel style de boxe ? Américaine ?

Je n’étais pas une experte en la matière, je savais qu’il y avait de la boxe américaine, française, anglaise, mais ça s’arrêtait là. Après, il me semblait que la première était plus violente que les autres, il s’agissait peut-être d’un simple cliché que j’avais là. D’autant plus que j’avais fait cette unique suggestion, à cause de l’accent fortement américain de Sam. Bref, dans tout ça, c’était une belle occasion d’en apprendre plus sur la boxe et sur le jeune homme ! Pour le coup, j’étais vraiment curieuse et si c’était un sujet qui plaisait à mon interlocuteur, cela ne devrait pas lui poser de soucis pour me répondre, si ?

Difficile de perdre le sourire à présent. Sam n’a pas l’air dérangé du tout par ma présence, ni par ma conversation, au contraire. Et je suis tellement contente, que je manquait à tomber dans les marches. Mais heureusement, le sportif ne sembla pas le remarquer ou alors il avait fait mine de ne pas voir. Ce qui n’était pas sans m’arranger, il ne manquerait plus qu’à ce qu’il croit que j’étais maladroite et… Bon, d’accord, il n’aurait pas totalement tort. Mais si j’étais maladroite, c’était simplement parce que j’étais distraite. Je n’avais pas de problème d’adresse sinon.

- Non. J'ai fait du kickboxing pendant un temps, et puis j'ai essayé la boxe anglaise, la classique, et je me suis rendu compte que je préférais. C'est moins spectaculaire mais plus technique. Et puis bon, faut dire ce qui est, ça m'a plu parce que j'étais plus doué ! J'avais pas complètement terminé de grandir quand j'ai commencé et les coups de pied... Bah, j'avais pas une amplitude formidable.

Je hochai la tête en souriant pour montrer que je suivais. Comme je l’ai déjà dit, je n’y connaissais pas grand chose en boxe, mais je sais pas, j’étais contente qu’il fasse de la boxe anglaise. Une sorte de fierté qui n’avait pas trop lieu d’être, d’ailleurs. Que voulez-vous, je ne pouvais pas nier que j’aimais mes origines. De toute façon, même si je ne les aimais pas, je n’aurais pas d’autre chose que de vivre avec.

- Être doué dans un domaine est un bon argument pour apprécier la discipline. Je ne suis pas sûre d’avoir déjà assisté à un affrontement de boxe anglaise. Est-ce aussi violent qu’on peut l’imaginer ?

Je n’étais pas pour la violence. Je crois que ce n’était pas difficile de le deviner. Si je devais me retrouver dans une posture fâcheuse, il y avait peu de chance que je réplique de mes poings. Puis même si j’avais ce réflexe, je ne pense pas que cela m’aiderai tant que ça. Contrairement à mon interlocuteur, je n’avais pas de passion pour la discipline, ni de connaissance de la technique et encore moins de talent.

La conversation fut coupée par notre arrivée au secrétariat. Pas de chance. C’était la pose. Je plissais le nez. Ca commençait bien. Je n’aimais pas tant les clichées sur les membres de l’administration, mais il faut dire que ce panneau n’aidait pas à les contredire.

- Bon... Ben je vais devoir attendre... J'imagine que le bureau que tu cherches est un peu plus loin, par là.

Le regard dirigé vers la porte en question, je hochais la tête. En effet, il semblerait que c’était là ma destination. Est-ce que je devais y aller maintenant ? Ou attendre Sam ? Avant que je ne prenne ma décision, le sportif poursuivit :

- Au fait ! Toi aussi t'es anglaise ? Je veux dire comme la boxe ?

Vu son accent, j’aurais été surprise que mon interlocuteur me dise qu’il soit lui aussi anglais. Cependant, le doute se fit, pendant un quart de seconde. Sam dû le lire sur mon visage, d’où sa précision rapide. Je souris à nouveau.

- Exactement. J’ai un peu de mal à m’en cacher, haha. Un produit 100% anglais, tout droit venu de Cambridge.

Est-ce qu’il y avait un peu de fierté dans mes propos ? Oh, ce serait un euphémisme que de le dire. J’hésitai pendant un instant d’en rajouter, mais j’allais sans doute être agaçante si je ne parlais que de moi.

- Mh, je crois que je devrais en profiter, tant que le bureau est ouvert, je reviens.

Je ne laissais pas le temps à Sam de me répondre, que je m’éloignais après lui avoir adressé un clin d’oeil. Mais qu’est-ce qui te prend Josie ? Je crois que c’était ma tentative de paraître cool. Ridicule, vraiment. Je frappais à la porte du bureau avant d’entrer. Cela ne me pris pas beaucoup de temps. Une minute à peine. Le temps de saluer la secrétaire, lui expliquer la raison de ma venue, lui remettre l’attestation, la laisser me confirmer que tout allait bien, lui souhaiter une bonne journée et sortir du bureau. Sam était toujours là. Je trouvais ça assez malpoli que de l’ignorer à présent que ma tâche était accomplie. Puis, j’avais bien envie de poursuivre notre conversation. Alors je revins vers le jeune homme :

- Je crois que je suis plus chanceuse que toi aujourd’hui.

J’affichai un sourire malicieux, était-ce de la provocation ? Si c’était le cas, elle n’était pas méchante, je vous le promet. Je repris rapidement :

- Et vous alors mister, aussi américain qu’Edgar Allan Poe ?

Et pourquoi pas ne pas prendre un auteur américain comme référence ? Il avait bien pris sa discipline pour m’interroger, je pouvais faire de même.

Sam avait l’air déterminé à compléter son dossier et je ne pouvais que le comprendre, ça m’agacerait aussi de courir dans tous les sens et de devoir abandonner sans être sûre que les choses ne soient pas terminées aujourd’hui. Histoire de ne pas avoir à se déplacer à nouveau inutilement. Bref, j’avais entamé la conversation sur autre chose, bien décidée à apprendre à connaître un peu mieux le boxeur. Ce n’était pas souvent que j’arrivais à être à l’aise aussi facilement avec quelqu’un, autant en profiter ? Sam avait définitivement une attitude qui donnait envie de lui faire confiance.

- Euh, oui. Américain. Sans doute moins lugubre que Poe par contre ! Enfin, j'espère !

Sa réponse me fit rire. Il n’avait pas l’air aussi lugubre que Poe du tout, j’allais lui répondre. Sans doute quelque chose d’un peu amusant, une sorte de tentative de blague, en lui disant que pour le côté lugubre ça resterai à prouver. Mais le retour de la secrétaire, interrompit notre conversation. Finalement, c’était une victoire pour Sam aussi ! Il venait de rendre son papier pour compléter son dossier !

- On dirait que tu m'as porté chance ! La prochaine fois, tu me diras pourquoi t'es à la W-U et pas à Cambridge.

Je lui répondis pas un grand sourire avant que mon cerveau ne bloque sur la fin de sa phrase. La prochaine fois ? Oh, oui, évidemment Josie, maintenant que les papiers étaient rendus, vous n’aviez plus de raison de rester ensemble. Je ne sais pas à quoi je m’attendais. Puis Sam m’adressa un clin d’oeil et réussi à me faire rougir. D’accord, peut-être que ce n’était pas si difficile. Et après tout, je lui en avais fait un moi-même un peu plus tôt, mais… je n’avais pas l’habitude que l’inverse arrive ?

- See you, Josephine ! J'espère qu'on aura l'occasion de se recroiser sur le campus !

Je levais la main timidement pour lui faire un signe d’au revoir également.

- Moi aussi ! A la prochaine Sam !

Avec un dernier sourire, je vis Sam rentrer dans le bureau et fermer la porte derrière lui. J’aurais pu l’attendre. Mais maintenant qu’on s’était dit au revoir, j’imagine que je n’avais pas de raisons de rester. Et je passerai sûrement pour une sorte de stalkeuse à rester là, non ? Allez, ressaisis-toi Josie, si tu dois te prendre autant la tête à chaque garçon mignon et sympathique que tu rencontres, tu n’en as pas fini. Je lâchai un petit soupire, réajustai mon la lanière de mon sac sur mon épaule et quittai le bâtiment administratif. J’espérais que Sam n’aurait pas davantage de problèmes avec son dossier. Au final, cette affaire avait été vite réglé, ce qui me laissait plein de temps pour m’occuper à l’esprit à autre chose. J’avais bien l’intention d’aller lire, mais sur tout le trajet mon esprit eu du mal à penser à autre chose que cette rencontre et les milles phrases que j’aurais pu dire à la place de celles qui étaient sorties.